Des élèves aux jeunes

À propos

Intervenante : Josiane Boutet (Université Paris-Sorbonne)

L’ensemble des sciences sociales voient à la fin des années 1980 un reflux de la pensée critique et politique, de la visée de transformation sociale et d’émancipation. Les causes en sont multiples, de nature politique comme scientifique. Chez les sociolinguistes, on remarque que des problématiques pourtant fondatrices de la discipline dès les années 1970 - comme celle de l’école et des inégalités linguistiques et scolaires – régressent (cf. F. François, le CRESAS, l’INRP, etc.) On ne parle plus dans les termes des inégalités sociales, d’un accès socialement inégal aux ressources scolaires et culturelles, mais dans les termes de l’exclusion ; et plus tard de discriminations. A la thématique du « langage populaire » des années 1970 succède celle du « langage des jeunes », scolarisés ou du moins en âge de l’être, issus de familles migrantes ou non, bilingues ou non.

Les études du parler des jeunes, des banlieues ou des cités connaissent un formidable développement dans le monde entier. On analyse les spécificités (phonétiques, lexicales, discursives, interactionnelles) des jeunes dans une visée de reconnaissance de ces particularités. De même, concernant les élèves non exclusivement francophones, des dispositifs européens se mettent en place comme le Linguistic Awareness, dont le but est de reconnaître et faire reconnaître par la communauté éducative la diversité des langues parlées par les élèves.

Il ne s’agit pas de nier l’importance de la reconnaissance des parlers des élèves, l’intérêt qu’il y a à leur apporter, grâce à la description et l’analyse sociolinguistique, une forme d’existence sociale. Mais on peut se demander en quoi ces descriptions peuvent contribuer au changement social ? En quoi elles permettent de s’attaquer aux inégalités scolaires ? En quoi elles aident les élèves dans leurs apprentissages? En quoi elles leur permettent d’accéder aux pratiques de la langue scolaire légitime ? Etc. Ce sont ces questions que nous soumettrons au colloque.