L’éducation par le voyage : une autre subjectivation de l’enfance et de l’adolescence

À propos

Inventer des modèles d’éducation par le voyage, c’est (pro)poser, non une école alternative, ni même une alternative à l’école, mais les conditions de possibilité d’une subjectivation enfantine et adolescente radicalement autre, considérée non plus à partir d’une progression temporelle des âges de la vie, mais sur fond d’un éloignement spatial, sous le signe de l’apoikia. Cette éducation n’existe pas encore sous la forme émancipatrice et créatrice où elle est défendue dans cette thèse, parce que le voyage hors cadre institutionnel est ordinairement considéré comme étant le propre de l’adulte, mature et responsable, capable d’en assumer le coût et d’en supporter les vicissitudes. L’éducation par le voyage offre-t-elle la possibilité d’une conduite à risque utile et formatrice, avec la mise en expérience de soi qu’elle sous-tend ; constitue-t-elle une réponse à l’hyperkinésie des enfants et des adolescents qui ne tiennent pas en place ; ou bien est-elle par nature inadéquate à ce qu’il convient a priori à leur âge ? L’immaturité qu’on leur prête peut-elle progressivement se conjurer au cours du voyage, ou le rend-elle au contraire infécond, voire physiquement et psychologiquement dangereux ? En présentant un autre paradigme de l’enfance et de l’adolescence gambades, il s’agira chemin faisant de modéliser l’expérience des voyagenèses, comme manières originales de se vivre : certains styles de voyage forment la jeunesse lorsqu’ils invitent à se transformer soi-même en transformant le monde. Décoloniser l’enfance, c’est par le voyage apprendre à vivre au dehors du corps programmé, non plus soumis aux organes des appareils idéologiques d’État, mais au-delà des rôles contraints et des pouvoirs conjurés.

“The world is a book, and those who do not travel read only a page” (Augustine).By presenting patterns of education through travelling, this thesis deals with neither an alternative school nor an alternative to school in general (Ivan Illich, Deschooling Society), but the conditions of another paradigm of child and teenage traveler.This education does not exist in its emancipatory and creative forms yet because travelling is usually regarded as being the characteristic of the mature and responsible adult who can assume the cost and the risk.Can spending a lot of time in other countries rewire the child’s brain?A style of travel shapes youth when it invites to change oneself by transforming the world. By studying the last chapter of John Locke, Some Thoughts concerning education and Jack Kerouac, On the Road, this academic research deals with how the final part in classical education is usually dedicated to learning from the great book of the world (René Descartes). Travelling is commonly thought as a good way to finish the academic work. Reconsidering emancipatory education through the condition of postmodernity and the international mobility, this thesis is a critical discourse on education as practised in postmodern economies. It explains the phenomenon of migration and exile, the civilization of perpetual movement: nomads in the postmodern world.“One’s destination is never a place, but a new way of seeing things” (Henry Miller).