Amelia Biagioni : ex–centricité et projet poétique

À propos

Ce travail part de l’hypothèse que l'oeuvre d'Amelia Biagioni, poétesse argentine du XXe siècle, n'a pas joui de la reconnaissance méritée – ce que nous appelons «ex-centricité» - et que ce phénomène est en lien avec son projet poétique. La première partie aborde la trajectoire de Biagioni depuis une perspective sociologique, et compare ensuite son oeuvre à d'autres propositions du champ poétique de son pays. La première période de son itinéraire poétique, d’inspiration traditionnelle, est associée, entre autres, aux lignes postmodernistes et quarantistes. Dans la deuxième période, on constate des similitudes avec Thénon, Pizarnik et Girondo, l’influence de ce dernier apparaissant également dans la troisième période de la production. Nous concluons que les similitudes interviennent depuis un lieu en décalage, empêchant de promouvoir Biagioni avec d'autres projets de la même génération, mais que l'ex-centricité est avant tout déterminée par des facteurs externes à l'oeuvre. La deuxième partie étudie la pratique poétique de la troisième période autour de deux axes : la subjectivité et le langage. Cette étape surmonte les principes négatifs de la seconde période, en partie grâce à la remise en jeu de certains aspects de la période initiale, désormais reformulés à partir d'une expérimentation profonde tirant ses racines de l’avant-garde. L'originalité réside ici dans une conception de la poésie comprise comme «multiplicité affirmative et vitale» qui la démarque définitivement d’autres de son milieu. Sont ainsi consolidés «ex-centricité et projet poétique», parce qu'ils cristallisent aussi dans ces textes toutes les notions que Heinich (2000) associe au régime de singularité.

This work is based on the hypothesis that the production of Amelia Biagioni, Argentine poet of the 20th century, has not benefited from the legitimisation it is due – we call this «excentricity » – and that this phenomenon is in relationship with her poetic project. In the first part, Biagioni’s trajectory is approached from a sociological perspective, and later her work is compared with other proposals from the poetic field in her country. The first phase of her production, of a traditional nature, is associated, with post-modernist and forties poetry. In the second phase, similarities can be seen with Thénon, Pizarnik and Girondo; and the latter’s influence is also observed in relation with the final phase of her production. The conclusion is that these similitudes occur from a position of maladjustment, which prevents the promotion of Biagioni along with other poets of her generation. But the ex-centricity is established mostly by determining factors external to her work. In the second part of the thesis, the poetic practice of her third phase is analysed along two axes: subjectivity and language. In this phase, the negative principles of the second phase are overcome, partly through the repositioning of aspects from the initial phase, albeit now reformulated from a profound experimentation of avant-garde roots. Here, the originality stems from a conception of poetry as a «vital and affirmative multiplicity», which definitively differentiates it from other projects of its milieu. In this way, «ex-centricity and poetic project» are consolidated, also because in these texts come together all the notions that Heinich (2000) associates with the singularity regime.